La municipalité de Lisle-sur-Tarn et le musée Raymond Lafage ont été heureux de vivre une aventure extraordinaire grâce à cette exposition.
La rencontre entre Lafage et Lautrec, deux vies brèves et deux oeuvres intenses : deux météores !
Raymond Lafage a vécu 28 ans, Henri de Toulouse-Lautrec 36 ans ... On a rarement insisté sur la juvénilité de Toulouse-Lautrec ! Si peu d'années pour atteindre une telle gloire !
Pourquoi l'Artiste a-t-il choisi le cirque ?
Il se souvient que sous le chapiteau, tout numéro sans filet fait vivre le danger, l'aspect "morceau de bravoure" de chaque exercice rappelle son propre travail. L'artiste s'attache à représenter un exploit, un exercice dangereux où toute maladresse ou chute ne pardonnerait pas. Lui-même y risquait sa liberté. Il faut des années pour monter un numéro qui se déroule en quelques sécondes. Certains acrobate défient les lois de la pesanteur. La virtuosité technique de Toulouse-Lautrec confirme celle de l'écuyère ou celle de l'acrobate qui nous donne le vertige.
Lors de son internement dans la maison de repos du Dr Sémelaigne, au printemps 1899, Toulouse-Lautrec ressent la nécessité de prouver sa bonne santé mentale. Pour pouvoir enfin sortir, il réalise une série de dessins sur le thème du cirque. L'artiste revient aux sujets chers à son enfance, à toute sa vie. Le cirque fait parti de son monde enfantin, soit comme spectacle soit comme jouet. Aucun autre thème n'a été traité avec autant de constance par Toulouse-Lautrec à travers toute son oeuvre, d'autant plus que le cirque lui permet de redire au détour d'une piste son amour pour le cheval.
L'ensemble est comme vu de haut ou de loin, évoquant le recul, qu'il réussit à avoir par rapport à sa situation. La présence du bord de la piste qui le plus souvent ceint l'espace est une allusion à sa réclusion forcée.
Le 17 mai 1899, les médecins confirment "l'amélioration physique et mentale" de son état de santé permettant ainsi sa libération. A sa sortie, Toulouse-Lautrec fier de son travail affirmait : "J'ai acheté ma liberté avec mes dessins".
Ses premiers dessins sont commencés en mars et terminés en mai. Arsène Alexandre, ami d'Henri de Toulouse-Lautrec, critique d'art, inspecteur général des musées français, qui a plusieurs fois rendu visite à l'artiste à l'hôpital qualifie ce moment de "tragique aux apparences riantes !" et affirme, que les dessins "furent exécutés entièrement de mémoire, sans documents, sans croquis préalables, sans notes, points de repère ou jalons d'aucune sorte, c'est-à-dire un véritable prodige d'intelligence plastique, une de ces tentatives que beaucoup d'artistes, en effet, déclareraient de "folles", étant incapables de les mener à bien."